POINT DE VUE – Publié dans Les Echos – 28 mai 2020
Si les semaines de confinement ont apporté la preuve de l’utilité économique de la transformation digitale, le 28 juin prochain doit être le rendez-vous de son utilité démocratique. Il en va du succès du second tour des élections municipales !
Le 28 juin prochain aura lieu le second tour des élections municipales. Après un premier tour maintenu 48 heures avant le confinement, son organisation dans les 5000 communes sera un véritable test en ce qui concerne les conditions sanitaires. Une occasion aussi de développer le vote par procuration. Car si le droit de vote est pour le citoyen l’un des plus précieux, encore faut-il réussir à faire enregistrer sa procuration. Bien que les pouvoirs publics se soient engagés à en simplifier les démarches, le vote par procuration est encore en 2020 un parcours kafkaïen – qui n’est pas sans rappeler celui d’Astérix dans ses Douze travaux et sa recherche du laissez-passer A38, disponible au guichet numéro 2 avec le formulaire bleu.
Dans l’obligation d’y avoir recours pour le premier tour en mars, j’ai donc vécu une véritable expérience citoyen-utilisateur qui appelle trois constats et un vœu pour le second tour à venir.
Premier constat : une dématérialisation inaboutie
Lors de ma connexion sur le site du Ministère de l’Intérieur en mars dernier, je constatai déjà que la digitalisation du parcours se résumait à une simple dématérialisation avec la possibilité de télécharger un formulaire CERFA en ligne. Document qui ne pouvait, et ne peut toujours pas, être correctement rempli sur ordinateur (blocage de champs et police inversée). Je décidai donc d’imprimer puis de remplir à la main le formulaire papier.
Second constat : incohérence des informations entre les canaux physique et digital
Quelle ne fut pas ma surprise, une fois arrivé au Commissariat central un dimanche matin, de constater que le dépôt des procurations n’était possible qu’en semaine, du lundi au vendredi, et aux horaires d’ouverture du service : 9h30 – 17h30. La plage horaire me surprit, comme tout citoyen-administré confronté à ces horaires que l’on pourrait qualifier d’abscons. Une fois sorti, je pris néanmoins le temps (à contretemps, me diriez-vous) de vérifier à partir de mon smartphone l’information sur le site de la Préfecture. Les derniers horaires indiqués, toujours en ligne à ce jour, dataient des élections présidentielles de 2017, et précisaient une plage plus large de 9h à 18h.
Troisième constat : l’enjeu humain, mécanique essentiel de la transformation digitale
Déterminé et écourtant un rendez-vous client le lundi matin, je parvins ainsi à me rendre une nouvelle fois au Commissariat central à 11h49. Les bâtiments administratifs appellent en effet ici trois remarques essentielles : les horloges en nombre, semblent être les éléments cardinaux de l’aménagement du mobilier administratif ; elles sont digitalisées et bien synchronisées ; elles permettent enfin de mesurer notre temps effectif de « présence ».
Première surprise : malgré l’exemplaire du formulaire CERFA imprimé, rempli et signé, les agents d’accueil m’indiquèrent sèchement à 11h51 que le guichet fermait à 12h. Par inquiétude et solidarité avec le responsable des horloges du Commissariat, je vérifiai l’heure sur mon téléphone. Et il était bien 11h51.
Seconde surprise : en dépit d’une ébauche d’explication relative à mes contraintes professionnelles, l’agent me coupa, me réitéra son refus, m’informa de nouveaux horaires d’ouverture (de 9h30 à 12h, et de 13h à 17h30), se leva, me précisa qu’en français un non signifiait un Non, et quitta son poste. Soulagé de ces précisions linguistiques, il était 11h52 et je me retrouvai sans procuration, à 6 jours du premier tour des élections. Preuve en était, que la transformation digitale, comme tout changement ne pouvait réussir sans l’engagement complet de tous les acteurs, un management inspirant et des équipes formées.
Cette expérience passée et les constats présents conduisent à exprimer un simple vœu, celui d’une transformation digitale accélérée. Une procuration 100% en ligne, à partir du numéro national d’électeur, doit être rapidement offerte à tous, comme l’a été le recueil des soutiens en ligne du référendum d’initiative partagée (RIP).
Si les semaines de confinement ont apporté la preuve de l’utilité économique de la transformation digitale, le 28 juin prochain doit être le rendez-vous de son utilité démocratique. Il en va du succès du second tour des élections municipales !
A retrouver au format PDF en cliquant ici.
A retrouver sur le site de Les Echos en cliquant ici.